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| La ville de Ghardaïa |
Les différences ne doivent pas mener à de tels conflits. Elles traduisent un mal beaucoup plus profond et nullement spécifique à cette région. Ce qui se passe à Ghardaïa est symptomatique de la nature de l'ordre social algérien, qui a mis une chape de plomb sur la société, l'empêchant de se livrer à un débat démocratique pour faire émerger un nouveau contrat social. C'est également symptomatique de la perte d'autorité morale de l'Etat due à son absence de légitimité politique. Le risque est que dans le futur, ce genre de tensions devienne plus fréquent ailleurs dans le pays. Il n'y a pas de solution miracle. Ce que je ferai à très court terme, si je suis élu, eh bien je commencerai par avoir du respect pour mes compatriotes en allant les voir pour les écouter, entendre de leur bouche ce qui ne va pas et non leur proposer de leur distribuer de l'argent ! Je mettrai ensuite en place un processus de concertation entre les communautés pour que la solution ne viennent pas «d'en haut», mais qu'elle émerge à travers un dialogue social qui inclue l'Etat et les citoyens.Ce qui est donc certain, c'est que l'Etat doit agir en étant neutre et en usant d'une autorité qu'il aura acquise du fait d'être le garant d'un contrat social, ce qui n'est malheureusement pas le cas.
L'Etat doit intervenir, c'est son rôle. Il y a trois niveaux d'intervention. D'abord, il faut que les forces de sécurité déterminent si certains attisent les contentieux qui existent depuis longtemps et exploitent ces affrontements. Ensuite, notre Etat doit insister sur la notion de tolérance et de respect des minorités, qu'il faut l'intégrer dans les programmes scolaires. Il faut des lois qui protègent les plus faibles, et ce, quelques soient les minorités. Car derrière tous les problèmes de minorités, il y a une menace sur la cohésion sociale. Enfin, l'Etat doit travailler sur les tensions économiques. Il y a un déséquilibre régional : à Ouargla également il y a eu des émeutes, mais il n'y a pas de problème de communautés dans cette ville ! En réalité, dans le Sud, les Algériens s'estiment lésés dans leurs intérêts. Il y a des problèmes de travail et de logement alors qu'ils sont assis sur du pétrole. Les événements de Ghardaïa sont symptomatiques de l'échec de toutes les politiques. C'est un problème politique qui n'est pas pris en charge. L'Etat est en déliquescence.
Je ferai d'abord un diagnostic, et pas seulement pour Ghardaïa. Nous avons une population qui ne s'exprime pas car tout est verrouillé, mais cela ne veut pas dire qu'elle ne comprend pas les choses de la cité. Il y a manifestement un problème économique à la base, car ce sont des magasins qui ont été brulés d'abord. Si c'était un problème religieux, pourquoi les Mozabites du pays, d'Alger et d'ailleurs, ne sont pas inquiétés ? Mais il y a aussi des problèmes politiques, comme pour la Kabylie et Batna. Avez-vous vu que Ferhat Mehenni, pour s'exprimer, a dû aller en Israël ? Les gens aiment Matoub, mais pourquoi ses chansons ne passent pas à la télé ? Il y a beaucoup d'inconséquences et de restrictions. Trouvez vous normal qu'on exige d'une jeune mariée qu'elle produise un certificat de virginité ?
Il aurait fallu que le président de la République intervienne. Il aurait également été plus efficace que des institutions locales fiables et représentatives soient entendues. La priorité est le renforcement du maintien de l'ordre. Il me semble aussi indispensable de soutenir les familles les plus démunies pour que leurs enfants puissent répondre à l'autorité parentale. Il y a, à la lisière de Ghardaïa, près de 300 familles qui n'ont aucune ressource. Ensuite, il faut engager des investissements pour réduire le chômage qui atteint des taux insupportables. Il existait des usines dans cette région, elles ont fermé les unes après les autres. Enfin, il faut revoir la politique d'éducation pour y intégrer un contrat de citoyenneté. Je remarque que le Premier ministre a perdu toute autorité morale et que la vraie solution passe par un changement de régime.
La politique, c'est l'art de prévoir. Ainsi je dirais que la première chose est d'être capable de prévoir les tensions avant qu'elles naissent. Aussi, il faut écouter et comprendre avec lucidité et sérénité les aspirations des citoyens et trouver des solutions fiables et crédibles. Car le but de la politique noble est d'intégrer les citoyens à vivre ensemble.
Je propose un Etat de droit et la sécurité pour tous. Plus concrètement, il faut que la police nationale de Ghardaïa assure la sécurité que des commerces et de tous les habitants sans distinction d'origine sociale ou éthique. Aussi, il faut mettre en place un dispositif social et économique pour garantir le travail aux jeunes en difficulté. Et je propose de jouer le médiateur si les parties concernées sont d'accord pour trouver une solution juste.
Aujourd'hui, l'autorité de l'Etat est inexistante, les personnes censées faire régner l'ordre ne sont pas à la hauteur. Et lorsque des gens commencent à mourir, cela peut devenir irréversible. Il existe dans cette région un véritable décalage socio-économique entre deux communautés. La communauté ibadite est très organisée. Mais il est du devoir de la République de créer l'égalité entre les citoyens et de donner des opportunités à l'autre communauté. C'est pour cette raison qu'il est nécessaire de décentraliser les décisions économiques. Ce n'est pas au pouvoir central de décider comment les deux communautés doivent se développer. Enfin, il faut que les élus des assemblées locales soient véritablement élus, car ce sont eux qui connaissent la réalité des problèmes locaux.

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