Le président ? Absent depuis le 16 juillet dernier. Son Premier
ministre ? Sa dernière apparition publique remonte à vendredi 20 juillet à
Londres où, avec son épouse, il assistait à la cérémonie d’ouverture des JO de
Londres ? L’Assemblée nationale ? Sitôt installée le 26 mai, ses
députés se sont mis en congé d’été. Le nouveau gouvernement ? Il attendra.
Mais en fait qui gouverne l’Algérie ?
Evacuons
d’emblée l’Assemblée nationale. Depuis l’accession au pouvoir d’Abdelaziz
Bouteflika en avril 1999, cette institution est devenue un parlement plus que
croupion. Les députés ne décident de rien, votent à main levée toutes les lois
présentées par l’exécutif et ne moufettent pas quand le président légifère par
ordonnance. Ce qu'il a fait des dizaines de fois.
Evacuons
ensuite le gouvernement et ses ministres. Depuis l’amendement de la
constitution en novembre 2008, l’exécutif a été transformé en un simple
appareil assujetti à la présidence. Le Premier ministre qui a perdu l’ensemble
de ses prérogatives au profit du président a été réduit au rang de simple
factotum.
M. Ahmed
Ouyahia, en poste dès juin 2008, ne décide de rien, n’engage aucune décision
sans s’en avoir au préalable l’aval de la présidence. C’en est encore plus vrai
que les réunions du gouvernement se font presque dans la clandestinité, sans
que le contenu de ce qui s’y décide ne soit porté à l’opinion.
Reste le
président ! Jamais depuis l’indépendance, l’Algérie n’a pas connu pareille
situation de vacance des pouvoirs à la tête de l’Etat.
Si. Au cours
de l’été et de l’automne 1978, le pays était plongé dans pareil état avec la
maladie puis l’agonie de Houari Boumediene, mort en décembre 1978, mais la
situation n’aura pas duré plus de 6 mois.
A bien des
égards, nous sommes donc en face d’un remake de 1978 mais avec une différence
notoire. A l’époque du parti unique, cette vacance aura duré 6 mois. Boumediene
a pris des vacances en Yougoslavie en juillet, il a été évacué en octobre en
URSS, et tombé dans le coma en novembre et il est décédé en décembre.
Aujourd’hui,
c’est comme si le pays était plongé dans un état comateux qui peut encore durer
des mois tant que Bouteflika restera aux commandes du pays. Du moins jusqu’en
2014 date de la fin de son troisième mandat.
A mi-chemin
de ce troisième mandat, Bouteflika est devenu un président fantôme. Sa dernière
sortie remonte au 8 mai 2012 à Sétif. Depuis, l’homme qui court sur ses 75 ans,
s’est bunkérisé. Pas le moindre discours, pas la moindre sortie sur le terrain.
Bouteflika ne s’adresse même plus à ce peuple qui l’avait réélu en avril 2009
avec 90,24 % des suffrages. Que dire alors de ces Conseils des ministres qui se
tiennent une fois tous les six mois.
Pour donner
un semblant d’existence à sa fonction, il accorde des audiences aux hôtes de
son pays, se fait photographier sur le perron du palais de la Présidence,
envoie des messages à ses compatriotes ou se fait représenter à l’étranger par
de hauts responsables de l’Etat.
Son absence
s’est doublée d’une autre : celle du gouvernement. Songez que depuis le
mini-remaniement ministériel de mai 2012, celui-ci fonctionne en mode stand-by.
Avec sept ministres qui cumulent des portefeuilles par intérim, dont certains
relèvent des fonctions régaliennes de l’Etat, à l’exemple de celui de la
Justice. Existe-il un seul pays civile au monde où le ministère de la Justice
est géré par un intérim depuis 4 mois ?
Mais ce
n’est pas nouveau. En 1999, Bouteflika aura attendu 8 mois pour former son
nouveau gouvernement annoncé le 24 décembre 1999. Mais même à l'époque, il y
avait un gouvernement celui de Smail Hamdani qui remplissait correctement ses
fonction.
Ceux qui
attendent donc la formation d’un nouvel exécutif peuvent prendre leur mal en
patience.
C'est que le
président Bouteflika gère les affaires du pays comme il a toujours pu gérer son
itinéraire depuis qu’il a quitté ses fonctions de ministre des Affaires
étrangères en 1978 : au gré de ses humeurs, selon son propre rythme, en
fonction de son propre agenda. Ce mode de gouvernance s'est davantage accentué
avec l'âge et la maladie du chef de l'Etat.
Affaibli par
la maladie, âgé, coupé du contact avec ses compatriotes, le chef de l’Etat a de
fait pris en otage l’Algérie d’autant plus qu’il aura réussi à monopoliser tous
les centres de décisions en hyper-présidentialisant l’exercice du pouvoir.
Résultat :
le pays est dans un état comateux. Et dire qu'il reste encore 20 mois avant la
présidentielle d’avril 2014.
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