Vendredi 18 avril 2014
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Ali Benflis |
« Je refuse les résultats du scrutin, sinon j'aurais cautionné la
fraude, la fraude a sali d'une manière dangereuse la légitimité de celui
qui en a bénéficié », a déclaré Benflis, ajoutant que « l'Algérie sera
gérée par procuration, situation unique qui met en danger la sécurité du
pays ».
« Même Staline n'a pas eu ses scores », a t-il lancé. « Celui qui n'a
pas parlé, qui n'a pas bougé durant la campagne a obtenu huit millions
de voix, et moi qui ai sillonné le pays, je n'ai eu qu'un million de
voix ! ».
Benflis accuse encore : « Tayeb Belaïz présidait un comité de
soutien, pas un ministère de l'Intérieur ».
Benflis semble annoncer la
prochaine création d'un nouveau parti : « Nous sommes devant une
situation de blocage qui nécessite le changement du système en place, le
régime est arrivé à ses limites, cette situation nécessite une réponse
ferme, le changement ne viendra qu'avec une résistance populaire
pacifique ».
Ali Benflis lance un appel pour un « rassemblement national
large pour répondre à cette situation, et c'est le dialogue politique
qui est le moyen d'arriver à ce rassemblement », poursuivant qu'« un
nouveau combat politique nous attend, un nouveau combat dans un cadre
politique ouvert à ceux qui croient à mon projet pour l'Algérie ». «
L'alternative démocratique doit être consensuelle et organisée », a t-il
dit.
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Ce vendredi, lors de la déclaration de Ali Benflis à son QG. |
Verbatim : la déclaration de Ali Benflis
Déclaration liminaire de Mr Ali Benflis
Candidat indépendant à l'élection présidentielle
Mesdames et Messieurs des medias nationaux et internationaux
Vous avez été les témoins directs et les observateurs
privilégiés du scrutin présidentiel qui vient de connaitre son
dénouement.
Chacune et chacun d'entre vous en a fait sa lecture et en a
tiré ses conclusions. Je souhaiterai donc partager avec vous ma propre
lecture et mes propres conclusions ainsi que les enseignements
politiques que j'en ai tiré personnellement.
Mes conclusions principales sont au nombre de trois :
- Ma première conclusion est qu'il n'va pas eu
d'élections. Il ne faut pas se voiler la face, ce dont il s'est agi ce
17 avril c'est une répartition administrative des suffrages entre les
candidats à l'élection présidentielle.
A sa discrétion et selon ses préférences le régime en place a gratifié ou pénalisé les candidatures présentes au scrutin.
- Ma seconde conclusion est que mon projet politique pour
l'Algérie a rencontré un engouement insoupçonnable et a gagné une
adhésion très large. Le peuple algérien dans son ensemble et celles et
ceux d'entre vous qui m'ont suivi durant ma campagne électorale ont pu
constater par euxmêmes la réalité incontestable de cet engouement et de
cette adhésion.
Les résultats annoncés ne réussiront jamais à gommer cette
réalité qui est d'ores déjà ancrée dans la mémoire de toutes les
algériennes et de tous les algériens. En conséquence, je considère que
ma candidature et mon projet politique ont été accueilli avec une
ferveur populaire qui est allée au-delà de tout ce que j'attendais ou
espérais.
- Ma troisième conclusion est que contrairement au
candidat du régime en place et l'inconsistance de son de projet qui ont
fait l'objet d'un rejet de grande ampleur, ma candidature et mon projet
ont su susciter la confiance et l'espoir. En conséquence je n'ai pas été
battu par le suffrage populaire et je n'ai pas échoué dans une
compétition électorale honnête et loyale. Si cela avait été le cas, j'ai
en moi suffisamment de courage politique, d'honnêteté et de ressources
morales pour l'admettre et en assumer les responsabilités.
Si les
suffrages s'étaient exprimés de manière sincère et intègre et si le
jugement du peuple aurait été rendu de manière irrécusable je l'aurai
accepté et je m'y serai soumis avec déférence et respect. Entendez moi
bien et retenez ici: Mon échec a été préparé, planifié et organisé par
une coalition qui porte trois noms: la fraude, l'argent douteux et
certains relais médiatiques inféodés aux puissances détentrices de cet
argent douteux. Voilà la réalité irréfutable. Voilà les faits avérés. Et
voilà la grande forfaiture que le scrutin du 17 avril n'arrivera jamais
à masquer. Mesdames et messieurs, permettez-moi de vous livrer quelques
réflexions sur chacune des trois composantes de cette coalition dont je
n'ai subi personnellement qu'un dommage collatéral mais dont la
principale victime, est le peuple algérien tout entier qui a vu sa voix,
son choix et sa volonté faire l'objet d'un détournement aussi
irresponsable et tellement contraire aux valeurs les plus élémentaires
de l'éthique politique.
Permettez-moi de commencer par l'analyse de la fraude.
La fraude qui s'est manifesté de manière éclatante dans cette soirée du 17 avril a été préméditée et programmée de longue date.
Le gouvernement a été reconfiguré pour que les
portefeuilles en charge directe de l'organisation de l'élection
présidentielle soient attribués aux proches parmi les proches du
candidat du régime en place.
C'est le premier ministre, président de la commission
d'organisation de l'élection présidentielle qui présente la candidature
du candidat du régime au lieu et place de l'intéressé lui-même et qui
deviendra le directeur de sa campagne.
Tout le Gouvernement de la République a été ravalé au rang peu honorable de comité de soutien du candidat du régime en place.
Les présidents du Conseil de la Nation et de l'Assemblée
Populaire Nationale se sont docilement accommodés du rôle de porte voix
de ce candidat.
Le conseil Constitutionnel n'a pas assumé ses missions et
ce faisant, il a commis une forfaitaire. Une candidature manifestent
irrecevable a été entériné par ses soins sans aucun égard pour notre
Constitution et nos lois.
L'administration locale est normalement tenue par le
devoir d'équité, de neutralité et d'impartialité. Par la menace,
l'intimidation et la contrainte ses agents ont été forcés à servir la
candidature du régime en place.
Je ressens profondément le devoir de dire ceci à mes concitoyennes et à mes concitoyens:
Premièrement, la fraude est le vecteur d'une légitimité
faussée en ce que ses bénéficiaires se discréditent eux-mêmes
consciemment ou inconsciemment. Le respect ne leur est pas accordé; leur
autorité est contestée; ils ne sont investis d'aucune confiance.
- Deuxièmement, la fraude est un patrimoine commun de tous
les régimes autocratiques qui se rejoignent en ceci: la volonté
populaire qui leur 1 importe peu, le citoyen qu'ils tiennent pour
négligeable et la légitimité et la légalité qu'ils rabaissent au rang de
considérations formalistes sans importance.
- Troisièmement, la fraude exprime un sentiment de peur et
de méfiance à l'égard du peuple dont l'on doute des choix et redoute
les décisions: 1 pourquoi frauder si l'on est si sûr de l'adhésion
populaire?
- Quatrièmement, la fraude s'accompagne toujours de ces
autres violences que sont les chantages à la peur et au chaos car les
fraudeurs ne cherchent pas à convaincre mais à contraindre; leur but
n'est pas de s'entourer d'une adhésion populaire mais de se constituer
des clientèles et des relais rentiers.
La fraude incarne, selon moi, le
sommet de la malfaisance politique. Elle représente l'obstacle majeur
auquel est confrontée l'alternative démocratique. En effet, aussi
longtemps que le choix du peuple souverain, les valeurs d'une pratique
pluraliste saine et le cours d'une vie démocratique normalisée resteront
otages de la fraude, l'alternative démocratique ne se réalisera pas. La
lutte contre la fraude devra impérativement passer par un
ressaisissement de toutes les forces politiques et sociales qui viendra
rappeler à tous ceux qui fraudent, faussent ou trichent que la volonté
populaire importe, que la voix citoyenne compte et que la libre
expression démocratique est une exigence.
Mesdames et Messieurs,
A la lumière de tout ce que je viens de dire, le scrutin d'hier n'en était pas un.
C'est la fraude qui a parlé au moment même ou le peuple
algérien était, une fois encore, bâillonné. Je ne reconnais pas les
résultats de ce scrutin. Je les contesterai par toutes les voies
politiques et légales.
Mais au-delà de ma position personnelle, ce qui importe
aujourd'hui plus que toute autre considération c'est l'état et le sort
de la République elle-même. Je tiens à faire, à ce sujet, deux constats
qui me semble d'une extrême importance:
- Mon premier constat est que la fraude entame gravement la légitimité de celui qui en bénéficie.
- -Mon second constat est que le bénéficiaire principal de
cette fraude est au vu et au su de tout le monde dans l'incapacité
d'assumer les hautes charges nationales: c'est donc une gestion par
délégation de la République que notre pays et notre peuple vont
désormais connaitre.
Cette situation inédite est d'une gravité extrême. Elle
n'est ni acceptable ni tolérable. Elle exige une réaction patriotique de
toutes les forces politiques et sociales soucieuse des intérêts vitaux
de notre grand peuple et de la grandeur de notre partie. Il s'agit ici
d'une résistance populaire qui doit pour s'exprimer. C'est dans cet
esprit que j'ai appelé hier et que je renouvelle aujourd'hui, mon appel à
un grand rassemblement patriotique au service de la République. En
lançant cet appel j~ suis animé par quatre convictions essentielles :
• Ma première conviction est que le système politique
algérien a conduit le pays à l'impasse totale dont nous sommes les
témoins aujourd'hui. La sortie de cette impasse commande inéluctablement
le changement de ce système ;
• Ma deuxième conviction est que ce système a fait encore
la démonstration irréfutable de son incapacité à faire sa propre mue
pour répondre aux attentes de notre peuple et s'adapter au changement
que connait le monde qui nous entoure.
l'alternative démocratique sont les acteurs incontournables de ce changement;
• Ma quatrième conviction" enfin, est que l'alternative démocratique devra être consensuelle, ordonnée et pacifique.
Consensuelle, elle devra s'assurer la mobilisation
politique et sociale la plus large autour d'elle; ordonnée, elle devra
agencer ses priorités en distinguant entre le plus et le moins pressant,
entre l'essentiel et le secondaire dans le cadre d'une démarche
graduelle; pacifique, elle devra avoir pour mot d'ordre le dialogue
politique comme moyen de sa réalisation. Il est incontestable que mon
projet politique a bénéficié d'une vaste mobilisation populaire. Des
femmes et des hommes y ont cru et y croient toujours.
Je ne les décevrai
pas. Je les invite à rester soudés et mobilisés pour le nouveau combat
politique qui nous attend. Ce combat commun exige du courage, de la
détermination et un souffle long.
Je sais que nous n'en manquons pas.
Bientôt, je vous annoncerai la forme et le contenu de ce combat
politique d'avenir qui devra être en symbiose avec son environnement
politique et social national.
Je tiens à m'acquitter, en conclusion de cette déclaration
liminaire d'un devoir de remerciement et de reconnaissance. - Un
remerciemènt et une reconnaissance d'abord envers ceux qui m'ont
soutenu, accompagné et porté avec moi le projet de renouveau pour notre
pays;
- Un remerciement et une reconnaissance aussi envers
toutes celles et tous ceux qui ont adhéré loyalement et sincèrement à
mon projet politique et ont acquis la conviction qu'il représentait une
chance pour .~ notre pays qu'il fallait saisir.
Un remerciement et une reconnaissance, enfin, envers tous
ceux qui ont voté pour moi parce qu'ils ont cru à la sincérité de mon
engagement politique, à la justesse de mon projet pour notre pays et à
son aptitude à relever les défis multiples auxquels il est confronté.
Sachez tous qui que vous soyez et où que vous soyez, que
vous êtes, citoyennes et citoyens que vous êtes, en dépit de tout, les
grands vainqueurs politiques et moraux de ce scrutin.
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